L’essor des légumes bio à Taïwan

Une ferme en biodynamie à Taoyuan
2-5/12/2019

M. Liu dans une partie de son exploitation, ici des légumes plein champ. Pour lutter contre les adventices et maintenir l’humidité dans le sol, deux techniques sont utilisées : le paillage plastique réutilisable ou le paillage dense par paille de riz (produite sur place).

Canon Liu s’est installé en agriculture biologique il y a 3 ans. Sa ferme, qui porte le nom de “Xiexiemi”, se trouve dans le district de Yangmei de la ville de Taoyuan. Son inspiration pour cultiver bio a été l’agriculture biodynamique, un système d’agriculture basé sur des dogmes ésotériques. Toutefois, l’efficacité reste le plus important à Xiexiemi, et le planning de travaille repose plus sur des nécessités que sur des rythmes astraux.

Qui de mieux placé que l’agriculteur lui-même pour expliquer sa démarche ?
Vue sur une partie de la ferme Xiexiemi.

Du riz et des légumes à cycle long (chou-fleur, maïs doux, carottes…) sont cultivés en plein champ, alors que des légumes-feuilles à cycle court et croissance rapide (laitues, petites brassicacées…) sont cultivés dans 8 serres-filets.

Les serres-filets protègent les plantes de la majorité des ravageurs et des précipitations intenses, deux facteurs majeurs de pertes de rendement, surtout en zones tropicales et subtropicales.

Ce modèle de culture bio de légumes verts à cycle court est encouragé par le gouvernement de Taoyuan, car tous les restaurants scolaires des écoles primaires de la ville doivent servir 3 repas par semaine contenant des légumes bios. Les fermiers cultivant sous serre-filet ces légumes à cycle court peuvent produire jusqu’à 12 récoltes par an !

Les serres-filets permettent une densité de plantation élevée, donc un haut rendement, qui servira d’abord à rentabiliser l’investissement que constitue l’installation d’un tel équipement.

Les inconvénients sont que cela incite à la culture d’une faible diversité de végétaux, à l’usage intensif d’engrais organiques du commerce (généralement de la fiente de poules) et de l’irrigation, et à labourer entre chaque cultures (donc jusqu’à 12 labours par an !!!). De plus, une quantité négligeable de matière organique est restituée au sol. Tout cela conduit à une très mauvaise structure et une salinisation du sol.
Canon Liu essaie d’éviter ces problèmes en utilisant du compost fait-maison (plus riche en matière organique lentement dégradable et en micro-organismes), en cultivant 8 à 10 fois par an, en réduisant le labour, et en introduisant quelques poules dans les serre-filets entre chaque cultures.

Les poules occupent les serres-filets entre 2 cultures. Elles se nourrissent en partie des insectes ravageurs et leurs fientes fraîches sont un bon engrais.

Pour les cultures en plein champ, le sol est principalement composé d’argile compacte car le terrain était recouvert de rizières inondés. Canon Liu utilise donc une sous-soleuse pour décompacter le sol en profondeur sans avoir à effectuer de labour profond.
Des engrais verts son également semés dans les rizières pendant l’hiver, et du biochar( 1) fait maison est parfois utilisé.

La sous-soleuse est capable de décompacter le sol en profondeur (plus de 50cm) et ne résulte pas en une inversion des couches du sol, elle est donc bien meilleure pour conserver la vie du sol qu’une charrue. (photo : 蟹蟹米農場)

Les légumes et le riz sont vendus dans la région à des enseignants, des employés de bureau, et à un restaurant préparant des “repas postnataux” (des repas sains préparés spécialement pour les mères dans le mois suivant la naissance de leur enfant).

Dépôt de commandes dans une garderie du voisinage.

Canon Liu essaie de réduire son utilisation de plastique, les légumes sont donc emballés dans de “l’agroplastique” d’amidon de maïs, emballages qui sont ensuite rendus par les clients lors des achats (10 sachets rendus propres, 1 sachet de légumes offert). Le riz est vendu dans des sacs en tissus réutilisables de nombreuses fois.

À bientôt pour plus d’agroécologie !

Sac à base d’amidon de maïs, “agroplastique”, pour l’emballage des légumes. Bien que leur impact environnemental global n’est pas forcément favorable par rapport aux sacs en plastique, il finissent par se décomposer totalement sans laisser d’éléments toxiques. Le mieux est de les réutiliser le plus possible.
Sac réutillisable en tissu pour le riz. (photo : 蟹蟹米農場)
Un outil simple et pratique pour effectuer les semis rapidement !
La ferme Xiexiemi fait ses propres plants pour maîtriser l’ensemble de l’itinéraire cultural. (photo : 蟹蟹米農場)


Notes :

(1) Le biochar (biological charcoal) est un charbon fabriqué à partir de biomasse, souvent des déchets de production agricole (ici la balle de riz), et qui est utilisé comme amendement agricole (ajouté au sol pour l’améliorer). Il permet en effet d’augmenter la capacité du sol à retenir l’eau et les nutriments, et permet aux micro-organismes de se développer. Ce serait également un moyen de stocker du carbone dans les sols de manière stable. (retour au texte)

Auteur/autrice : Yali

Je suis Alex, ingénieur agronome diplômé d'AgroParisTech, ayant fait une partie de mes études à Taïwan. Passionné de jardinage, d'agriculture, de botanique, d'insectes et autres bestioles, j'ai créé ce site afin de partager expériences, réflexions, innovations, actualités et études sur l'agriculture, sous le prisme de l'agro-écologie.

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